Accompagner un proche malade dépendant sans y laisser sa santé
Définitions
Les drogues sont tous les produits chimiques ou naturels, licites ou illicites, qui modifient une ou plusieurs fonctions (psychiques et physiologiques) de l’organisme et notamment la manière de penser, de percevoir les choses, de réfléchir ou de ressentir les émotions. Elles engendrent généralement un phénomène de dépendance. Il s’agit de substances qui vont agir sur le cerveau et le corps et provoquer une accoutumance.
La toxicomanie : « La toxicomanie désigne une dépendance physique et psychologique à une ou plusieurs substances, évoluant vers un besoin incontrôlable »
Selon l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) : « la toxicomanie représente une aliénation, une certaine privation de liberté puisque le toxicomane est profondément dépendant de sa drogue ».
La toxicomanie est une MALADIE et non un vice.
Dès lors que la consommation et/ou la dépendance devient problématique (échecs, repli social, perte de contrôle sur sa vie, impossibilité de fonctionner sans consommer…)on pourra parler de maladie (il n’est pas nécessaire que les doses consommées soient jugées énormes).
Les jeux (vidéo ou d’argent), la nourriture, le sexe, les produits psychoactifs (cigarettes, alcool, cannabis…) peuvent créer de la dépendance.
https://www.ofdt.fr/publications/collections/periodiques/drogues-chiffres-cles/7eme-edition-2017/
COMMENT ACCOMPAGNER UN PROCHE DEPENDANT SANS DESINVESTIR SA VIE PERSONNELLE ET FAMILIALE
Vivre avec un proche malade de dépendance et l’accompagner dans sa démarche de soin, qu’il soit votre enfant ou votre conjoint n’est pas une chose facile car on subit de plein fouet les conséquences de la dépendance. Cela peut mener à la dégradation de la relation qu’on entretien avec l’autre, l’unité familiale et les conditions de vie.
L’apparition, l’installation ou l’intensité de la maladie nous force à nous questionner sur ce que l’on a pu faire ou ne pas faire pour en arriver à cette situation. La culpabilité, l’incompréhension, la honte, la peur du regard extérieur peuvent nous pousser à nous couper de toute aide extérieure. La communication avec le proche et à l’intérieur de la cellule familiale peut se rompre également, laissant chacun au prise avec sa solitude, sa culpabilité, son sentiment d’impuissance et son besoin d’obtenir des réponses.
Le premier réflexe est souvent de demander au parent toxicomane de faire des efforts, de se soigner et de lui demander pourquoi. Vous l’avez compris, les choses ne sont pas aussi simples malheureusement. Et si on s’y prend mal, on peut même être contre-productif dans le parcours qui le mènera à décider de se soigner ou pendant son parcours de soin.
« Il est menteur, il est voleur, il est violent physiquement et verbalement. Parfois il est même méchant et tient des propos très injustes. Il est sale et négligé. Il me fait peur. Il me fait honte ». Vous ne le reconnaissez plus ? C’est normal, c’est la maladie elle-même, l’effet des toxiques et les fonctionnements que le dépendant met en place pour « survivre ».
COMPRENDRE POUR DEFINIR LES LIMITES DE VOTRE ACCOMPAGNEMENT
Si vous décidez d’accompagner un parent malade, il peut être intéressant d’intégrer de bonne foi ce qu’est la maladie afin de mieux appréhender et dédramatiser les situations que vous allez ou que vous êtes amené à vivre. Tout revoir sous un angle nouveau pour l’aider dans son parcours (qui est un véritable combat).
Quand on comprend que la toxicomanie est une maladie, il devient logique qu’on ne peut pas imposer à un malade de guérir. De plus, il s’agit d’une maladie chronique. On ne peut que l’accompagner et le soutenir, le laissant libre du choix et des modalités de la thérapie. De plus, on ne peut pas le guérir malgré lui. Il lui revient donc la décision de faire ce qu’il doit faire, au moment où il se sent prêt pour le faire et ce, même si vous pensez qu’il pourrait faire autrement, plus vite… C’est une condition pour sa réussite.
DIALOGUER DANS LE RESPECT
A un moment propice pour lui, vous pouvez exprimer votre ressenti. Ce que vous aimeriez pour lui, pour vous et toute la famille. Parler de tout. L’essentiel est que vous pesiez vos mots en évitant de le juger, le culpabiliser ou lui imposer. Aidez-le à s’exprimer. Essayer d’entendre ce qu’il a vous dire même si cela peut vous sembler injuste, exagéré, faux ou si ses propos vous heurtent ou vous font mal.
Cet échange n’est pas l’occasion de lui faire des reproches, du chantage ou de porter un quelconque jugement mais doit installer une confiance réciproque.
Le dépendant ressent déjà, très souvent, un sentiment de honte et de culpabilité il serait donc improductif d’en remettre une couche.
A CE STADE, IL EST IMPORTANT DE COMPRENDRE QUE L’ACCOMPAGNER VA ETRE :
- Accueillir ses souffrances même si vous ne les comprenez pas.
- Eviter le chantage ou l’ultimatum (surtout si on est incapable de l’assumer ou de le mettre en pratique).
- Se débarrasser du sentiment de culpabilité.
- Le laisser prendre ses décisions, à vous, si vous le désirez, de le soutenir et de l’accompagner en fonction de ce qu’il a décidé pour lui.
- Prendre le recul suffisant pour rester apte, objectif et utile dans le soutien que vous souhaitez lui apporter. Pour les décisions que vous allez prendre pour vous-même ou le reste de la famille (décisions personnelles ou professionnelles). Décider de lui faire confiance, quel que soit ce qu’il a déjà tenté et qu’il a échoué, l’impression que vous avez de son manque d’implication, motivation…
C’est lui qui décide de ce qu’il veut faire, comment et à quel rythme. A ce titre, gardez-vous de la tentation de prendre la main sur sa vie, ses choix, ses soins et de tout contrôler.
- Lui accorder le droit de ne pas vouloir parler des soins qu’il reçoit, des rendez-vous thérapeutiques et contenus de ceux-ci.
- Le laisser gérer. Ses rendez-vous, ses médicaments, tous les actes de sa vie pour le garder acteur de sa vie, éviter une pression et un phénomène supplémentaire de dépendance (affective et co-dépendance).
- Essayer de faire la part des choses entre ce qu’il est et ce qui relève de la maladie (mensonges, vols, agressivité, violences).
- Pensez que l’amour ou la volonté sont les deux moteurs pour la guérison est une erreur totale (même si cela aide ce ne sont pas des conditions suffisantes). Cette information est une donnée qu’il est bon d’intégrer de part et d’autre. Cela lui évitera de culpabiliser (même s’il ne le montre pas, culpabilité et honte sont prégnants dans le malaise qu’il ressent). En ce qui vous concerne, cela vous gardera de toute déception également.
- Eviter de faire à sa place, de décider pour lui ou de réparer pour lui. Laissez- le se confronter à sa réalité et tirer conclusions et conséquences de ses actes ou de ses manquements. Il y a de forte chance qu’il se sente dévalorisé (il a déjà peu d’estime pour lui-même) mais aussi parce que cela le déresponsabilise avec pour effet de ne pas intégrer les conséquences de ses actes et donc de les reproduire.
- Se garder de jeter les bouteilles ou les toxiques : il retournera s’en procurer à nouveau. Ce sera pour lui ou pour vous des frais supplémentaires et pour lui une prise de risque supplémentaire.
Pour sa santé : le manque peut être dangereux.
Pour sa sécurité : danger sur la route, retour auprès des dealers.
- Songer à établir des limites fermes : lui est-il possible de consommer à la maison ? où ?…Cela instaure de la sécurité pour le restant de la famille et un repère pour le membre malade.
- S’assurer de faire ce que l’on dit et de dire ce que l’on fait. Les règles doivent être claires, connues, respectées et expliquées. Elles devront être réalistes (c’est-à-dire possibles pour le malade de s’y tenir),
- Garder de la cohérence dans ses propos. Les conséquences d’une transgression aux limites et règles définies doivent être assumées (notions de « repère » et de « responsabilisation »).
VOTRE DEVOIR, S’IL EN EST UN, EST DE CONTRIBUER AVEC LE RESTE DE LA FAMILLE AU MAINTIEN DE L’EQUILIBRE ET A LA COHESION DE LA FAMILLE
Le dépendant reste un membre de la famille. A ce titre, il ne doit pas être au centre de vos préoccupations ni la priorité de toute la famille. La cellule doit rester en équilibre où chaque membre garde sa place et l’attention qu’il est en droit d’attendre. Une famille soudée et harmonieuse l’aidera davantage que s’il sent qu’il est la cause de son éclatement ou de son malaise.
- Savoir vous accorder du temps pour vous, seule et avec le reste de la famille sans ressentir de stress ou de culpabilité.
- Vous ressourcer, au contraire vous apporte l’équilibre nécessaire pour tenir le coup et l’accompagner efficacement.
- Réinvestir la famille, l’entourage familial et amical.
- Accepter que certains membres de la famille se désengagent, ne s’impliquent pas ou le fassent autrement. Chacun agit en fonction de ce qu’il est et de ce qui lui est possible de faire.
- Faire confiance au personnel soignant et acteurs sociaux qui lui viennent en aide pour pouvoir lâcher prise. Ce sont des professionnels qui sauront s’adapter à la personnalité et à la situation de votre proche. Sachez profiter justement de ces moments pour vous accorder du temps pour vous, votre famille et votre entourage. L’occasion de penser à autre chose, de vous divertir et de vous ouvrir vers l’extérieur.
- Communiquer et expliquer ce qui se passe au reste de la fratrie et si besoin à l ‘entourage proche. En effet, très tôt les enfants se rendent compte des situations « spéciales » qu’ils sont amenés à vivre et souhaitent en avoir des explications. Quel que soit l’âge et le degré de précocité de l’enfant, il existe toujours un discours approprié pour lui expliquer les choses et le rassurer. Si vous avez compris et intégré le postulat que la dépendance est une maladie, les enfants et votre entourage le comprendront également. C’est pour cela qu’il pourrait être intéressant de travailler sur les sentiments comme la honte, la culpabilité, la peur d’être jugé etc… qui sont autant de freins sur le parcours de la guérison du proche et de l’accompagnement.
- Faites-vous accompagner par des spécialistes. Echangez avec d’autres familles dans une position similaire.
- Faire la part des choses dans les conseils et informations que vous allez collecter et trouver les solutions et le fonctionnement adaptés à votre situation propre.
- Accepter de jeter l’éponge si cela devient impératif. Pour sauver votre peau, votre famille… Si on ne peut pas reprocher à un malade d’être malade, on peut, sans honte ni culpabilité, renoncer à être le témoin de sa « déchéance » lorsqu’on n’en peut plus. Même si cela ne semble pas correct, à priori, il y a parfois des cas de figure où il faut savoir s’arrêter (et si vous ne savez pas de quoi je parle, c’est que vous n’en n’êtes pas là et c’est plutôt rassurant !!)
Accompagner et soutenir un parent dans la maladie demande une préparation, une compréhension de la maladie, des parcours de soins. De ce qui est bon de faire pour lui mais avant tout pour vous même. N’oubliez jamais que pour être utile et efficace, il vous faudra vous ménager pour conserver un équilibre psychologique et physique et maintenir l’harmonie familiale.
La gestion et la conservation de vos finances ne sont pas à négliger non plus (vous voyez de quoi je parle n’est-ce pas ?).
Besoin d’aide ?
http://al-anon-alateen.fr/qui-sommes-nous/
https://lavieautaquet.com/2017/10/16/co-dependance/
http://www.vielibre.org/joomla3/